De Düsseldorf, dont on me vanta pourtant la beauté de la vieille ville, je ne connais aujourd’hui -après une courte incartade en pays teuton- que son nom à la résonance un peu stricte, son parc des expositions immense et organisé tel un échiquier et le Spoerl Fabrik, petite perle culinaire perdue dans la périphérie de la ville.
Et pour cette découverte là, je ne regrette pas mes quelques jours coincée sous les néons d’un salon presque vide où ma fantaisie latine dépareillait régulièrement face à la rigueur allemande, ne sortant que pour prendre l’air ou plutôt la bruine, le froid et la fin de l’hiver germanique.
Plutôt située en périphérie qu’en plein centre ville, je cherchais désespérée, un restaurant où emmener dîner un client. Repue et gavée de CurryWurst -cette spécialité faite d’une saucisse industrielle noyée sous le ketchup et étouffée de curry- d’apparence apeurante mais néanmoins succulente dont l’effet pervers est de vous rendre amorphe pour le temps de la digestion; j’espérais trouver un lieu un peu moins typique, un peu plus léger.
Dans le dédale des rues de ce quartier du nord de Düsseldorf, nous trouvons derrière une porte cochère à peine éclairée, une cour presque intime entourée de vieilles maisons de brique. Une ancienne imprimerie face à nous, quelques boutiques de créateurs, une ambiance chic-underground et la porte du Spoerl Fabrik s’ouvre devant nous.
Tables en bois usées par le temps mais cirées avec soin, pierres au sol rappelant l’ancienne vie de la maison, lumière douce tamisée, cuisine à vue, accueil chaleureux et tout en délicatesse, Paolo Conte, Aznavour, Buena Vista Social Club en fond sonore révèlent une connaissance pointue et un goût touchant pour la culture internationale à l’image des plats que nous nous apprêtons à déguster.
Saveurs européennes et orientales, jeux de couleurs, de formes, de consistance et d’aspect dans nos plats où se mêlent et se croisent émulsions de sésame, thon frais, risotto et roquette pour un mélange tout en finesse et en saveurs exhalées par ces originales tentatives.
Dans cette ambiance art-déco feutrée, chic tout en restant chaleureuse avec pour musique d’ambiance la playlist d’un mélomane de goût, autour d’une cuisine inventive et délicate et dans un cadre raffiné, j’aurais adoré qu’au Spoerl Fabrik, on me fasse une déclaration enflammée plutôt qu’entre deux plats, on me tende une pile de dossiers à traiter.